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art africain méconnu

Art africain méconnu.

    La meilleure pratique de l'art, quel qu'en soit la tendance, est celle qui fut développée par les africains, connu sous le nom d'art nègre. Cependant, les occidentaux n'arrivent jamais à l'interpréter, ni à le reproduire, avec le doigté et le style qu'il faut. Un exemple frappant fut donné en 1905 par des européens qui, ayant essayé d'interpréter l'art plastique africain, n'ont apporté que des ratures. Ces ''ratages'' du style d'art africain furent dénommés par eux-mêmes ''cubisme''.

    Un autre exemple flagrant est l'action painting de Jackson Pollock, dont les œuvres furent classées comme expressionnisme lyrique. En réalité cette tendance de l'art occidental, aussi bien comme tant d'autres, n'est qu'une application conceptualisée des protocoles et des rhétoriques multiséculaires du batik, du bôkôlan, de l'indigo…

    Par ailleurs, le design actuel est carrément une application du principe fonctionnaliste emprunté à l'art africain utilitaire. Cela a été le remède qui a donné un souffle nouveau à l'art occidental moribond alors en proie à des crises répétitives quasi permanentes depuis 1900.

    L'inconscience générale du monde de tels forfaits est corroborée par le fait que, même les disciplines scientifiques telles que l'anthropologie, l'ethnologie, la sociologie, l'histoire…ne peuvent pas élucider les questions et les résolutions contenues dans cet art. Elles ne peuvent pas restituer la logique et les notions de sa philosophie ; et non plus réaliser des versions d'œuvres actuelles sur la base d'analyses théoriques conséquentes.

    En fait il faut savoir qu'une vraie critique systématique de l'art africain n'existe pas encore jusqu'à nos jours. Dès lors se pose le problème de comment enseigner l'art africain à l'école ? Puisque, à part la tradition orale aucune autre instruction n'est encore établie.

    L'histoire de l'art africain est méconnue. Cela pose des problèmes graves car celle des pays occidentaux est affectée de mensonges par le fait de s'appuyer sur des esthétiques usurpées aux africains. Non seulement l'art africain demeure méconnu théoriquement, mais aussi les plagiats qui se sont opérés dans ses principes font l'objet de nouvelles tendances artistiques dans les pays occidentaux.

    Nonobstant l'usurpation du savoir africain par les esthètes occidentaux, les principes ainsi expérimentés d'après leur esprit cartésien, soit matérialiste ou bien idéaliste, en rajoutent aux connaissances et aux observations traditionnelles de l'art africain. L'Afrique recouvrira davantage sa mémoire dans la reconquête de ses valeurs endogènes, et enrichira toujours le monde de ses richesses culturelles ancestrales.

    Ce qui paraît étrange en matière d'art africain, c'est que le mot art n'est même pas annoncé dans les langues et les dialectes des terroirs d'Afrique. En effet l'art africain est dit anonyme non pas seulement à cause de la non signature des œuvres par leurs auteurs, mais aussi du fait que cet art ne se fait pas appeler par un concept déclaré : l'art africain ne dit pas son nom.

    La problématique que cela entraîne est plutôt de savoir sa définition et son entendement du mot art. Cela tire son importance du fait que le même mot art est très controversé et polémique dans la définition des pays occidentaux.

    Dans le cadre d'une pédagogie et d'une didactique, Amadou Hampaté Bâh déclarait : «  l'art africain ne s'apprend pas, on le vit ». En effet la transmission du savoir traditionnel africain se fait dans l'oralité et par l'expérimentation systématique à travers des initiations diverses. Cela est aussi une mise en garde prévenant que l'art africain est inexorablement voué à cultiver surtout le mode d'existence.

     Elsy Leuzinger aussi a prévenu que les ouvrages de l'art africain ne peuvent pas être appréhendés en leur appliquant les critères esthétiques d'Europe, et en les comparant aux différents courants de la culture occidentale. Selon elle : « - pour bien pénétrer leur originalité essentielle il y faut la disposition spirituelle voulue et une totale absence de préjugés ».

     L'art africain évoluera par son propre chemin, en s'actualisant, tout en s'occupant des grands problèmes de l'art contemporain dont il s'est approprié.

    Tous les africains connaissent le proverbe bamanan qui dit ceci : « yiri kurun mèn jila tè kèla bamba ye ; ni o tè, kôlôn kônô ntori tun be larabu wolo. » (Une souche d'arbre, pour avoir longtemps séjourné dans la rivière ne se transforme pas pour autant en caïman…).

    L'art africain demeure inchangé dans son essence avec pour seul mot d'ordre le rôle d'expression des valeurs de culture. Sa rhétorique, soit l'ensemble de ses procédures lui a valu d'être qualifié d'art vivant. Cela n'est pas anodin, à cause de leur pragmatisme et leur fonctionnalité dans le folklore populaire ; et aussi du fait de leur caractère permanent et intemporel soutenu par la tradition orale toujours vivace.

    En effet, son objectif utilitaire et son rôle fonctionnel sont voués à la résolution et à l'accomplissement de l'existence ordinaire : '' ka môkôya dilan , ka tolon kè, nyènajè, nisôndiya, lafasali, ladiyali, bilasira…''

    En référence à son origine, l'art africain est caractérisé naturaliste. Généralement l'esprit des cultures africaines provient de l'imitation de la vie naturelle, et opère dans une conception bio-ethique de la vie humaine. Aussi, les inspirations du génie créatif africain sont empreintes du sceau animiste-vitaliste. Cela est exprimé à travers le folklore populaire en termes de : sababuya, dalilu, barika, nakan/dakan, fèerè, nyama…Comme par exemple : « barika tè guansan ye; sababu lankolon tè. »

    Il s'agit des idées créatives provenant des observations naturalistes ; des conceptions issues de l'expérience de l'histoire et des manifestations des phénomènes biologiques. Cela occasionne la facture syncrétique des œuvres africaines où sont fréquentes les associations insolites d'éléments divers, les résolutions des harmonies audacieuses, les liaisons opportunistes des facteurs utilitaires avec les qualités esthétiques. Eu égard à tout cela, les figures de styles africains furent considérées comme tenant de la polyphonie.

    Dans les années 1910, les intellectuels occidentaux ont annoncé la mort certaine de l'art africain. Ils ont affirmé que les générations actuelles n'arrivent plus à produire des créations aussi édifiantes que celles d'antan ; et que par conséquent, l'art africain est éteint désormais.

    C'est après les années 1960 que commença l'équivoque des artistes africains modernes et contemporains. Cela s'est traduit par le mimétisme dans l'art africain, et toutes les sortes d'impostures nées de l'enseignement de l'art occidental dans les écoles modernes africaines. Ce sont les prototypes et les critères artistiques des pays occidentaux président généralement aux destinées des écoles d'art en Afrique.

    C'est ainsi que le Sénégal en a fait les frais, à cause du chaos dû à l'introduction par Léopold Sédar Senghor des maintes expositions cubistes qui ont occasionné l'abâtardissement des créations nationales, dès lors dégénérées en dadaïsme, nihilisme ou abstractions diverses. Depuis l'émergence de Fela Anikulapo Kuti, le festival des arts nègres n'apporte plus que des choses sans valeur, et pousse désormais les artistes à l'aliénation de la forme de leur art dans le dessein vénal de profiter du marché mondial. Pour soutenir et argumenter leur art, les artistes inventent désormais des raisonnements farfelus et incohérents. Dans l'apologie et l'argumentation de leur statut d'artiste, les avis sont très vagues de contenu. Les artistes de la world music sont de l'ordre d'un art du monde. Il y a aussi d'autres artistes pratiquant ouvertement les courants de l'art international. Dans ce dernier cas, par exemple, il n'est pas rare de rencontrer des pratiquants de l'un ou/et l'autre courant d'art occidental, sans aucune connaissance du contenu théorico esthétique dont il est question ; ou encore d'autres qui n'auraient pas vécu les contextes propres à l'émergence de ces tendances. Tout cela est révélateur de leur univers obscurantiste constitué de faux-fuyant et de faux-semblant, comme résultat du délire de leur déracinement et de leur acculturation.

  La sentence bamanan de l'identité ulturelle: "môkô dôn na ni kun na turu mun ye , ni a ye o di, a ye kèla dônbaka lafili ye" (En enlevant le modèle de coiffure qui permet de nous identifier, on devient méconnaissable).

    A présent, les appellations fréquentes de l'art africain sont le primitivisme, l'art brut, l'art naïf, l'art d'aéroport, l'art ethnique…

    Après tout, l'art africain est un art total. C'est dans cette logique qu'il faut l'appréhender pour mieux concevoir les sources (roots). Et pour illustrer cette conception phénoménologique, il suffit de rappeler l'art conceptuel qui représente l'expérimentation pure et simple de l'enchaînement systématique des protocoles de l'art africain. Cela est très révélateur  de cet art en tant que mode d'existence.

    Malgré tous ces plagiats des esthètes occidentaux qui nous éclairent sous un jour nouveau les principes essentiels et les rhétoriques de l'art africain, il y a encore des zones d'ombre et des aspects complexes qui demeures difficiles à raconter : l'art d'assaut africain en est un exemple, et aussi l'art positif qui fait allusion au caractère réactif et dialectique des résolutions esthétiques et culturelles. Expliciter les critères en référence au biface : « yan fèn nyuman, yen fèn goman » comme équivalent du yin yang dans l'art des peuples africains. Toutefois, chaque africain connaît l'éloge bamanan du changement perpétuel: "yèlèma-yèlèma be nkômi lamô ko nyuman; takula ma sôn o ma, a fan kelen sisi la ".

    Un raisonnement éclairé avec la logique et les notions conformes de l'art africain reste à instruire.

    Et pour finir, il faut évoquer le leitmotiv fréquent du yèrè dôn (se connaître soi-même), soit la question de l'identité africaine : « ji dôn, so dôn, yèrè dôn nyôkôn tè ». Cela est un adage bamanan connu de tous les africains, qui prône le maintient de l'identité propre envers et contre tout. Et se considère comme une sagesse et un mot d'ordre à propos de l'évolution de l'humanité ; voire, l'état d'âme à adopter dans le concert des nations.



08/10/2010
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